Il fait trop chaud.
Sérieux, j’ai pas d’endroit confortable où me poser.
Je sais pas par où commencer.
Je sais pas comment reprendre les corrections.
Et si j’ai pas d’idées ?
Je vais pas y arriver.
J’ai laissé passer trop de jours, je pourrais plus finir maintenant.
À quoi bon ?
Et si ça valait pas le coup, au fond ?
Le doute, c’est comme les grains de sable. Ça enrayerait les plus belles mécaniques de productivité. Mais quand il y en a beaucoup, c’est tellement confortable de rester vautré dedans.
Oui c’est long. Non je sais pas par quel bout le prendre. Mais j’ai un objectif : je veux finir ce roman. Je veux avoir une version « finale » qui ME convienne de A à Z. Que je pourrais publier en ligne sans repasser dessus.
Je suis pas écrivain, j’ai même pas d’éditeur ou d’éditrice pour me relire, me donner des conseils, des critiques, du feedback. Je fais avec quelques retours de potes, sans doute trop bienveillants, pas assez sévères. Je navigue un peu à l’aveugle, c’est vrai.
En fait, des excuses pour laisser ce projet en plan, bien au chaud dans un carton rangé dans le placard de mes aspirations, j’en ai plus qu’il n’en faut. Donc ce n’est pas en pesant le « pour et le contre » des efforts à fournir que je vais m’en sortir.
Tout ce dont j’ai besoin pour finir ce roman, et réussir le défi que je m’étais fixé, c’est de motivation. Juste ça.
Ben si, juste ça. J’aurais pas déjà écrit plus de 85 000 mots sur le sujet si je n’avais pas d’inspiration, pas d’envie, pas d’intérêt à écrire cette histoire. Donc inspiration, envie et intérêt : check.
Bref, des raisons de mener le projet à bout, j’en ai déjà. Quid des moyens de boucler, en revanche ?
Écrire, ça ne me coûte rien. Je ne peux pas plonger, donc je n’ai virtuellement rien à faire de mes journées (étant entendu que le soleil c’est Satan, donc j’vais pas me coller sur la plage en journée).
Le temps disponible : check. Et de toute façon, le temps, ça se prend. C’est une monnaie relative, on a dit !
C’est quoi, la motivation ?
Je crois que j’ai souvent cherché en moi la motivation comme si c’était une donnée : est-ce que cette idée me motive ou non ? Alors qu’en fait, c’est moi qui décide : à moi de me motiver (ou non) pour m’impliquer dans tel ou tel projet.
C’est juste un choix, tout simplement, au fond. Choisir d’allouer des ressources (notamment du temps) à ce projet plutôt qu’un autre. Choisir de focaliser son énergie et son attention sur ce projet, plutôt qu’un autre.
La motivation est une pondération du choix. Comme un super-joker, que je peux sortir à volonté pour dériver mes moyens sur le bon canal.
Avec de la motivation, tout coule, déroule, sans accroc.
Il a suffit que je m’y mette, ce matin. Que je me dise : c’est aujourd’hui. Soit je tue les deux prochains jours à me ruiner en 3G, actualiser mon fil Facebook alors que c’est le milieu de la nuit en France, soit j’ouvre ma dernière version, et j’en fais une nouvelle.
J’ai réécrit tellement de trucs dans le premier chapitre, et le plus fou, c’est que ça me venait tout seul. La motivation a cette puissance étonnante, de stimuler le corps et l’esprit à volonté.
La motivation de finir la course, même si j’vais faire un temps de merde et que je sens plus mes jambes. La motivation d’aller à cette conférence, même si c’est loin et chiant d’y aller. La motivation de m’atteler à cette tâche, que je ne fais que repousser.
C’est aussi un muscle qui se travaille. Au début, je lutte pour tenir ma planche pendant 30 secondes. Mes épaules s’affaissent, le dos me lance et mes mollets brûlent. Et puis, de 30 secondes par jour, on passe à 45, puis à une minute. Et ce qui me paraissait inatteignable est devenu une routine.
Tout ce que j’avais à faire, au début, était de rassembler la motivation de faire cette foutue planche tous les matins. Et ça finit par devenir une bonne habitude.
Je suis en train de relire le 18ème chapitre (sur 28). Il y a plus de taf sur la fin, donc j’aurais probablement pas fini demain.
Mais je vais finir. Parce que j’ai décidé de finir, parce que j’ai trouvé la motivation de finir.