D. 60 bis Décollage…

Ouais, j’ai déjà posté un truc aujourd’hui. Mais c’est l’heure du départ, ça y est.Tu auras remarqué que je dis « départ » et pas « retour ». C’est vraiment l’arnaque du siècle, de croire qu’on peut « revenir » de ce genre de voyage. Quand tu vas de l’avant comme ça, que tu affrontes des peurs, que tu te dépasses, accomplis des défis que tu n’aurais même pas imaginé il y a de cela quelques années, tu ne « reviens » pas à ton point de départ.

Tu vas de l’avant. Toujours. Tu vas plus loin qu’avant.

Je continue mon voyage, même si la prochaine étape ressemble à mon point de départ, je sais que ça n’aura rien à voir.

Hier soir, j’ai regardé le coucher du soleil depuis la plage de Kuta, saoûlée par la foule de touristes, saoûlée par les sollicitations permanentes des vendeurs en tous genre, bref, un peu saoûlée de tout en cette fin de trip.

Ce matin, je suis allée nager une demi-heure dans la piscine de l’hôtel, juste parce que je peux, un peu pour le kiff et beaucoup pour me fatiguer dès le matin, histoire de réussir à dormir dans l’avion.

Deux jours à Bali, c’était presque trop. Un de plus et je me faisais chier, c’est sûr. Et puis j’ai déjà fait tous les massages possibles (les massages d’une heure à 7€, ça va me manquer. Vrai-ment me manquer).

J’avais hâte de partir hier (aujourd’hui ça passait mieux, j’avais calibré ma journée pour ne pas avoir de temps mort). C’est parce que j’ai hâte de ce qui va suivre.

Je suis partie avec beaucoup de questions, sur moi-même, sur mes envies, sur mes projets, sur mes rêves, sur mon futur… sur mes ambitions. Et en deux mois, j’ai trouvé beaucoup de réponses. J’ai niqué des complexes et tué des démons, j’ai dépassé des frontières pour ma plus grande surprise.

C’est ma nouvelle drogue, je crois : ma capacité à me surprendre moi-même. Je vais continuer, c’est sûr : tu te lances un défi. Tu te demandes comment tu vas y arriver. Tu fais des plans, des tentatives, tu te plantes, tu corriges, tu améliores… et tu réussis.

Et ça, c’est vraiment un kiff de malade — pardon my french.

« Going home? »

À tous les gens qui me demandaient, ces derniers jours, si je rentre « chez moi », je répondais « oui » en pensant : rien à voir. J’ai pas de « chez moi », et quand bien même, « chez moi » c’est n’importe où je le décide, où j’ai des trucs à faire, où mes voyages m’emmènent.

Pour un temps encore, « mes voyages » m’emmènent à Paris, parce que c’est le départ d’une autre aventure, celle qui me motive le plus, et me donne envie de repousser encore plus de frontières. Encore des premières fois, encore des problèmes à résoudre, des puzzles à construire, encore des défis à relever.

Et puis, sans rire. J’vais pas abandonner le navire à la veille de l’élection présidentielle. Qui va monter au front contre l’OPA de l’extrême droite sur le féminisme, et démêler la xénophobie de la lutte anti-sexiste ?

Embarquement immédiat. See you on the other side, comme dirait Adèle.

D. 57 You can’t miss what you’ve never left behind

I used to cling on to stuff like talismans against the passing of time. Now that I’ve made my peace with time, I understand how my compulsive collection of random objects to save as « memories » was a waste of space and energy.

You cannot lose nor miss what you’ve never left behind.

I am leaving tomorrow, but I will take with me so much of Bira, so much of this summer that no matter how much time passes by, I’m sure to remember the essential.

Because, how could I forget any of this?

How could I forget that I nearly drowned out of excitement when I spotted the tiny pigmy seahorse that Laura had found, on my very last dive here? Or when I almost forgot to breathe, when we came across one of the most massive turtles I have ever seen, and another one swimming gracefully above and away, while a school of big bumphead parrot fishes passed us by?

There’s no way I could forget that last dive here, not with these massive, unknown fishes that swam right in front to us, to inquire about our presence. We’re still not sure what they were, clearly not tunas nor sharks, even though they shared characteristics with both species. [UPDATE: they were COBIAS omggg]

No way I would forget my first dive here, it was Eagle Rock again, the same site we did this afternoon, again, with Laura. Again, I was scanning the blue, and again, there was too much to see. A gigantic Napoleon Wrass, and especially a school of giant barracudas passed us by.

How could I ever forget the feeling in my chest during our first dive of the day, when my heart skipped a beat as I recognised the unmistakable mouth of a Manta Ray, flying away, a few meters under our fins.

I’ll take a piece of everything, for the rainy days

I’ll take away a piece of everything I love about this place, and store it close to this spot in my heart, where sadness sometimes sinks in. So the next time I’ll be feeling blue, I’ll flood it all with another kind of blue, where I used to fly around magnificent, strange and impressive creatures. All so beautiful and fascinating, that they must belong in my dreams anyway.

I’ll remember the laughters we shared on the boat, the warm tones of Wendy’s australian accent, and the way she called me « Clemo » (and how that nickname stuck the entire summer lol). The way Hannah’s big brown eyes light up when she laughs, the way Laura’s face breaks into a smile, how Charlotte celebrates her most exciting sightings with an enthusiastic « BOOYA! »… And so much more.

I won’t forget all of our smiles, how they shine so much brighter on darker skins. Surti’s laughter across the Rumah Makan, Ismail’s « Hey sister! » and our daily life here, in paradise. All the looks, signs, silences and smiles that made up for our lack of words between English and Bahasa.

I’ll take all of this with me, they’ll get me through the rainy days. Even if sometimes, it rains here too, in paradise; even those days were blessed.

Thank you, the #DreamTeam of Bira Dive Camp, for a summer to remember (entirely spent in my jammies, thus the name of this blog) (see what I did there?!)

I did 44 dives here, seen incredible sights, and I drowned myself many times: into the sky at sunset, through the moon and stars at night, into our laughters, and into pure bliss, every day here, and every night.

Thanks for everything ❤

Until We Meet Again.
🙂

D. 42 Est-ce que la nostalgie se dissipe avec le temps ?

Je me suis laissée surprendre par la nuit. Il est plus de 21h, mes paupières sont lourdes et mes épaules endolories. J’ai couru ce matin, nagé cet après midi (cette bullshitteuse d’oreille se comporte normalement), j’ai animé une journée d’exam et de tests pour 2 débutants… Et j’ai fini par me poser un peu.

Au crépuscule, la lune a volé la vedette. L’énorme sphère dorée s’est levée comme un soleil éteint, au beau milieu d’un ciel pastel, doux comme les reflets de nacre du sable blanc, tiède entre mes orteils.

Je suis restée longtemps les pieds dans la caresse de la marée descendante, à écraser les ondes dessinées par la fuite de l’eau sur le sable trempé. Sous la lune.

Un soir comme celui-ci appartient à ces jours frappés d’éternité. On ne les emportera pas au Paradis, car il en regorge déjà.

J’ai pas d’inspiration, ce soir. Ou plutôt, j’ai trop d’inspiration. C’est le bordel. J’ai pas envie de démêler les noeuds. J’ai passé la soirée étrangère aux conversations, mais baignée de l’ambiance chaleureuse de la terrasse cosmopolite (mais très française ce soir).

Avant, j’aurais bu un verre. Ou plusieurs. Désormais, je laisse les émotions infuser, et m’envelopper. Je n’ai plus peur de les ressentir dans toute leur intensité.

Élucubrations au crépuscule

Est-ce que la nostalgie se dissipe, plus le temps passe ? Est-ce qu’on arrête de se languir du passé quand on commence à se réjouir du futur ? Est-ce que je serais moins nostalgique si je pouvais prédire l’avenir ?

Est-ce vraiment le passé que l’on regrette, ou le confort de la certitude d’un monde connu, face à l’excitation mêlée d’angoisse des lendemains indécis, flous, indéterminés ?

Un peu tout ça, peut-être. J’ai la sensation d’être en train d’écrire et de tourner une page de ma vie, en même temps. Je suis fière et gonflée de nostalgie en regardant derrière, fière et gonflée d’envie en regardant devant.

Au fond, j’ai déjà le pouvoir de prédire l’avenir, en mieux : j’ai celui de le construire, le façonner selon mes envies. Je pense que la nostalgie grandit avec le temps, chez les gens qui subissent leur existence. Plus j’avance, et plus j’agis, moins je regrette ces moments qui me faisaient rêver à mettre ma vie sur pause, pour en profiter plus longtemps.

Est-ce que le bonheur a toujours un arrière goût d’amertume ? Peut-être. Comme ces mets raffinés qui écoeurent à l’excès, mais ravissent dans l’exception.

Ce soir, je me prélasse dans la perfection de ces instants, fruits du hasard et de la vie que je me suis construite. Un choix à la fois, au gré de mes inspirations.

D. 32 Entre passion et raison

J’ai dit que mon corps était un cheval, mais c’est plutôt un mustang, un cheval sauvage. Parce que je suis passionnée, et que mon monde n’est pas fait pour les gens passionnés. J’ai toujours l’impression d’être à la mauvaise place, de prendre trop de place, de faire trop de bruit, et en même temps, d’être étouffée, et à l’étroit.

Je vois bien qu’il y a un ordre, des étapes, des cerceaux par lesquels il faut passer, des obstacles qu’il faut sauter… Mais j’ai pas le temps, et pas l’envie non plus de faire des acrobaties pour épater la galerie. C’est méprisant pour les chevaux de dressage, pardon, je ne juge pas, au fond, chacun fait bien ce qu’il veut.

Can’t be tamed

J’ai passé beaucoup de temps à essayer de me dresser moi-même. De me mettre dans les cases qu’on me présentait, de rentrer dans ce rang où la vie paraît si simple. Mais il suffit d’un coup de vent dans la crinière pour que je me rappelle qu’on respire mieux dans l’étendue des prairies.

« Chassez le naturel, il revient au galop ». Effectivement. Je sais marcher au pas, mais ça m’épuise tellement, j’ai très vite besoin de me dégourdir les pattes avec un bon galop.

J’ai compris pas mal de choses chez moi cette année, et ce dernier mois, et je me sens plus stable sur mes appuis… Mais il restera toujours cette part d’énergie indomptable. Et j’ai fini de le regretter. (J’ai peur des chevaux, dans la vie… how interesting…)

Fuel of life

La passion, c’est de l’énergie, c’est une énergie qui me sert de moteur. Y a pas vraiment de vitesses, c’est plutôt ON/OFF comme modèle, et c’est pas sur commande, en plus. Alors quand c’est ON, ça fuse, ça décolle, et je peux aller très loin.

La plongée, c’est la première passion que j’ai suivie sans retenue. L’écriture était ma première passion tout court, mais je m’étais laissée dire que c’était pas un métier, puis que c’était pas un métier rémunéré, et enfin que c’était pas vraiment un métier, même si je pouvais en « vivoter ».

Toute l’énergie que j’ai mobilisée à me convaincre que ça ne me mènerait nulle part… Mais je serais où si je l’avais investie à aller de l’avant plutôt qu’à me retenir ? J’ai pas vraiment de regrets parce que je ne suis pas restée sur place en attendant la marée, mais je m’en suis servi de leçon.

Quand j’ai plongé pour la première fois, je ne me suis pas laissée « rationaliser ». J’ai foncé. J’y suis retournée. J’ai continué. J’ai investi. J’ai subi des contingences, des coups d’arrêts… Mais j’ai persévéré. Parce que tant que la passion est là, le levier est en ON et y a du jus. Je déplacerais des montagnes, et de fait, je vais conquérir des océans pour suivre cette passion.

J’en viens à me poser des questions sur mon avenir professionnel, et les voix qui me disent que c’est vraiment dur comme métier, et puis c’est mal payé, et puis est-ce que je suis sûre de moi… Leur écho vient de loin.

Rien n’est facile dans la vie, surtout quand on fuit la facilité. On n’est jamais sûr de rien, et c’est pas un mal en soi. Quand à la paie… je préfère être fauchée et épanouie que riche et cloîtrée dans un tailleur. Been there, done that, et je suis partie le jour où j’ai réalisé qu’aucun montant crédible d’augmentation n’aurait pu me faire continuer dans ce job.

J’ai appris par hasard que l’une des Divemasters quitte le camp, le mois prochain. Du coup, la responsable cherche quelqu’un. Je l’ai su en fin d’après midi, mais j’ai immédiatement connecté la question sortie un peu de nulle part avant la deuxième plongée aujourd’hui : elle m’a demandé ce que je faisais le mois prochain, si je rentrais en France…

Opportunités partout, frustration nulle part.

Mais je rentre à Paris le 6 septembre, mon autre passion a pris le dessus, depuis que j’ai enfin décidé de lâcher les chevaux. Il paraît qu’on n’arrête pas un cheval lancé au galop sur une plage. Il fonce tant qu’il y a du sable devant lui.

Ça tombe bien, j’ai pas l’intention de ralentir le rythme de sitôt.

J’ai passé tellement de temps à essayer de « me dompter », comme si ma passion était un danger pour moi. Mais ma passion, c’est moi. La rationalité n’est pas pour autant mon ennemie. J’aime penser que c’est mon cavalier. On peut toujours discuter avec la monture, mais au final, c’est le cheval qui a le dernier mot.

Ça va mieux quand on est sur la même longueur d’ondes, mais ça y est, je crois que le cavalier a enfin compris qu’il fait bien de lâcher la bride : on va plus vite et plus loin au galop.

Elle est belle, la vue sur cette plage… Mais cette passion souffrira d’un peu d’attente. J’en ai d’autres sur le feu qui ont déjà trop attendu, et trop d’énergie à investir dans ce voyage.

J’ai hâte, de pouvoir bientôt lâcher les chevaux.

D. 18 A day to remember

We stole away a day to a dimension we don’t belong to. When the sun rose over Wae Rebo, I didn’t move, too tired to lift myself up the dry leaves mattresses we had been provided for the night. But when breakfast was brought to the center of the hut, I could no longer ignore the call to rise.

Fried rice, corn crisps and some herb omelette I didn’t try had been served, along with another round of the local, incredibly good coffee. I found out over breakfast that I had been drinking water from the mountain the night before (I was too thirsty and in too dire need of water to inquire as to its origin), and since I didn’t get sick, I was no longer afraid to take generous gulps of clear water this morning, and re-filling my empty bottle.

We left the village around 9am, making our way down to Denge, back to our host. The man Tata, Ticka and Rian had heard about is offering us the hospitality of his family’s home for the day, and the night. We will leave at about 2am, when the public transport is supposed to depart for Ruteng. Translated into indonesian time, that may be any hour from 2 to 4, I guess.

But I wouldn’t trade my place for anything in the world. We spent the day with the family, and my only regret is to not be able to speak more indonesian to talk to them. Tata and Ticka do their best to include us in the conversation, but translating is wearisome.

We arrived from our trek at about half past eleven, and were welcomed with hot tea, that we drank on a straw sheet deployed specially for us in front of the house. We shared salt crackers, and while Magnus played cards with the girls, I went to wash away the sweat from the morning’s efforts.

I thought I’d miss hot water at some point, but definitely not today. The cool temperature struck my skin in blissful delight. When I joined my friends outside again, ready to begin this entry, they were surrounded by school children, apparently fascinated by the tall white man playing cards with the girls.

We shared lunch at our host’s table, rice & corn served with bitter vegetables and smoked fish. It was intimidating to be a guest in the household, and again, so frustrating not to be able to express my gratitude as much as I would have liked to.

Another coffee had us linger around the table, while the boys exchanged cigarettes. We ended up talking about tax rates and public education in France, Denmark and Indonesia, until I felt too drowsy to keep up with the constant language switch.

I was offered a bed in the main hut, and felt asleep almost instantaneously. When I woke again, the afternoon had ran away, and the family was starting to gather around, children taking interest in my writing, Magnus, the girls and the boys getting out the cards again.

Night fell and we moved to supper, but by now, my silence was starting to feel somewhat lighter. We are no longer strangers, imposing our presence in an unfamiliar place. We are guests, welcomed in this household for the evening.

This is not an experience you can order through a travel agency. This is the beauty and the wealth brought by random encounters, when strangers meet and share enough between them that they become friends.

I can’t wipe the smile off my face, and I will cherish the warmth growing inside my heart, that has chased away the awkwardness of the first hours.

I thought this day would be wasted away: we would be stuck in Denge, waiting for a ride out of there. But we ended up stealing away a priceless experience, in the heart of Flores.

This quote from St Exupéry, Le Petit Prince, comes to mind: « the essential is invisible to the eyes ». For sure. Even though I certainly got an eyeful, and the images of last night will be carved into my memory, no picture could even begin to sum up the feel of that day. After dinner, we all gathered in the main hut again, and the men got out their instruments to sing traditional songs.

I was on the verge of tears, so moved by the atmosphere of pure warmth, and sharing. We were all draped in sarongs (my new favorite piece of clothing, the best thing EVER), until it was time for bed.

For us, the night would be short. We had a 1:30am wake up call, to be ready for the ride back to Denge — whenever the ride might be ready. We ended up spending nearly 2 hours watching music video on some indonesian music channel, in the main corridor, sitting on the floor and drinking coffee.

At 3:30, we boarded the « trucksport », and bade our good byes. I will never forget this day. And as the truck began its bumpy descend through the jungle, it was blasting a very appropriate song, about making the moment last.

Nothing could wipe the smile off my face at this point. As we were dashing through the damp night in the jungle, I could hardly believe my own happiness. These moments aren’t even dream material, they’re token of eternity stolen from paradise.

Dawn crept on us, and lit up the rice fields as we reached the heights approaching Ruteng. Hardly the end of the road, though.

As I let the cold morning wind chill the skin of my face, I reminded myself of this thought, that I had confided in Magnus this morning, drunk from tiredness: I think this fucking ear infection is the best thing that has happened to me so far, in this trip.

Had I not been grounded for seven days, I would have been off diving around Komodo, having a fantastic time, for sure. But this day? That was a jewel, every minute of it. And I will cherish these memories like the priceless diamonds they are.

— Monday, July 25th

D. 12 La matière dont les rêves sont faits

Manta Point. J’ai pas écouté le briefing de la plongée, parce que j’avais mis de l’huile à l’ail dans mon oreille une grosse demi-heure plus tôt, et que je voulais la laisser en place encore un peu plus longtemps. Et puis surtout, j’avais pas envie d’écouter le briefing de départ en plongée à Manta Point, où le groupe s’apprêtait à aller observer les raies manta en pleine nature.

Aujourd’hui, encore une fois, je reste au sec, alors je retourne dormir. Et puis, Nasir, notre chef cuisinier à bord, est venu me tirer de ma demi-sieste.

« Manta ! Manta ! Manta ! »

Pas moins de quatre raies manta affleuraient aux environs du bateau. Le capitaine a coupé le moteur, et nous a laissé dériver quelques instants. Je ne voyais que quelques morceaux d’ailes dépasser de l’eau par intermittence, mais cette seule présence suffisait à me filer la chair de poule. Imaginer ces animaux gigantesques à quelques mètres de moi, même si je ne pouvais pas les distinguer sous les reflets du soleil, c’était déjà intimidant.

Mais Nasir est allé à la proue du bateau, aux côtés d’Hapis, notre mécano. Ils m’ont appelée, et je les ai rejoints, non sans appréhension : il n’y a plus de pont à ce niveau, il faut poser ses appuis sur les poutres de la structure, et se tenir aux cordages tendus jusqu’à la pointe. À quelques mètres sous mes orteils, l’eau était transparente. On voyait le fond sans souci, et il y en avait pour plus de dix mètres.

Et puis, j’ai retenu mon souffle, même si c’était inutile, puisque je n’étais pas sous l’eau, mais c’était tout comme : deux raies manta se sont approchées du bateau en volant gracieusement, à quelques centimètres sous la surface. Je n’ai jamais vu un animal sauvage aussi grand, d’aussi près, à l’état naturel. Et c’était beau. Que ces animaux sont beaux, immenses, libres, nonchalants et majestueux à la fois. Monstrueux aussi, avec cette gueule d’extraterrestre, qui s’ouvre pour avaler du plancton.

On m’avait dit deux mètres d’envergure, et on ne m’avait pas menti. Deux mètres de peau noire (vue d’au-dessus) et de soie blanche, découverte lorsque la bête se retourne ou prend un virage un peu serré, mais toujours aussi lent et ample. Avec sa queue longue et fine comme un fouet de cuir, et ses espèces d’antennes, on dirait un vampire en cape.

Superbes. Mes exclamations ont fini par rester au fond de ma gorge, et j’en ai eu les larmes aux yeux. Je n’avais jamais vu d’animal aussi impressionnant.

Et cette journée s’achève exactement où elle avait démarré : lorsque le capitaine a allumé les machines, l’aube commençait à peine. Je suis montée sur le pont supérieur, pour regarder le soleil réapparaître exactement en face de l’endroit où nous l’avions vu disparaître douze heures auparavant.

Et ce soir, au son de ma playlist (décidément for bien garnie) #IbaliveIcandive, je suis à nouveau posée sur le toit, en train d’imprimer dans ma mémoire chaque centimètre carré de ce panorama sur 360°C, parce que ce paysage est de la matière dont les rêves sont faits.

Je l’imprime pour que mon subconscient sache me ressortir ce décor avec précision les soirs où j’aurais besoin de chaleur et de réconfort pour trouver le sommeil. Lorsqu’il cherchera des idées de monstres à projeter pour exorciser des angoisses trop réelles pour que je puisse fermer l’oeil, il pourra toujours invoquer des vampires en forme de raies manta.

La surface de l’eau est presque parfaitement lisse, rompue par intermittence lorsque les tortues sortent la tête et le sommet de leur carapace pour prendre quelques respirations, avant de disparaître aussi subtilement qu’elles étaient apparues.

Des traînes de fumée balaient le ciel, allumées par les derniers rayons du soleil mourant. Derrière moi, des monts abruptes cachent maladroitement la rocaille volcanique et la pierre rouge sous de grossières mailles de végétation. À leurs pieds, toute une jungle s’est développée sur les marécages, qui abritent sans doute des nuées de chauve-souris.

Le vent est doux. Et je suis bien. J’ai compris le secret des gens heureux.

— Mardi 19 juillet

D 3. How to Save a Life

I want to keep a picture of this moment. But I can’t. The light is so special, it doesn’t show right on my miserable phone camera. And I can’t have that paradisiac landscape butchered in a low quality photography. So I just sit there — or rather, lay there, in my long chair, and I take in every detail of this barely credible place.

White sand stuck to my toes, after I washed off the dust of the road into the cristal blue waters of the lagoon. A hundred meters ahead, round waves roll up against a coral reef, and crash into a soothing noise. Out back, behind me, several beach clubs are playing summer hits, and the deep electro beats melt in together quite pleasantly.

Above, a sea of clouds is expanding from the east, shadowing the green mounts of Lombok. Patches of blue sky peak through the soft cotton pads. And to my right, the sun is slowly making its descent into the sea. The clouds haven’t reached that side of the picture yet, and the still waters of the lagoon shine a silvery reflection of the virgin skies, transpierced only by the fire track of the sun, and few dark rocks peaking above the surface, here and there.

The air is warm but feels fresh breathing in, and tastes salty on the palace. And I’m here, legs crossed on my chair, typing this all out to take this memory with me. I want to remember every detail, from the perfect green rolls of the wave to the colourful bikinis and the happy cheers of all the people enjoying this scenery, toasting to their holidays.

Beyond the reef, the fishermen are out, and a dozen of tiny boats are scouting the horizon.

So this is what a paradise looks like, up close

The light is fading, and soon, the island will become dark. I’m supposed to make my way back to the main street, lined up with bars and restaurant, serving touristy food and all kinds of drinks. The Wimbledon final in on at 8:30pm, and France is playing Portugal in the Euro Cup final at 3am tonight… Unsure whether or not I’ll make it.

Rescue training, Emergency First Response

It has been a long and trying day, but pleasant overall, and I see how that can be a paradox. My whole day was dedicated to my Emergency First Response training. It’s part of the skills required of a rescue diver, to anticipate and, in the event of an accident, to act as first responder. But the EFR training isn’t focused on diving accident, which has been extremely appreciable. I am now qualified to intervene and assist any victim, anywhere.

I spent the whole day with my instructor, asking questions about all the scenarios I had in mind, especially all the you-should-never & you-must-always myths. So spoiler alert: there’s no « you should never » in first response, but rather always assess the situation before doing anything, then assess whether or not the victim is conscious, and call for help. Then it’s mostly administering a first treatment if available (so on a diving boat, most probably, anywhere else, rather unlikely) and above all, monitoring vitals, trying to figure out what happened, gather as many informations as accurate as possible for the actual rescue team.

This is a training course, so there was an exam, but the real test I wanted to take, was to ask my instructor if he would feel confident if I were the first responder to an accident involving him. That’s the ultimate test, isn’t it? Would you trust this person you’ve just met this morning with your life? Are you confident enough in her training, and her ability to keep a cool head, to make the right calls in the right timing?

And would I be confident enough to step out and take charge as first responder on the scene of an accident? After today? Yes. And that’s what feels so good about this day. It wasn’t the first time I had listened to the litany of first treatments and major emergency procedures, but it was the first time I was hearing the practical side of them. The perks of your teacher being an actual EMT, for sure. So this is not theoretical to him, it’s over 8 years of field experience, that he has shared with me today. That’s how I finally learnt that the point of CPR is to get the blood flowing (not to jumpstart the heart, neither can you do that with electric shocks on a flatline), and that initiating CPR will result in breaking the ribs (that’s how you know you’re doing it right).

Well I’m certainly glad I didn’t find that out on the my first actual CPR. Breaking ribs feels easier if your first victim is a mannequin. (Sorry Annie) (Yeah that’s her name).

I thought I was going to suffer through yet another CPR initiation, but this day turned out to be most instructive, even enjoyable, in spite of the gruesome topic we ended up discussing, like triage of the victims, and making hard calls that may end up in someone’s death. Because sometimes, the right call is far from easy.

Today was also the first time I had a real conversation in over 4 days. I left Wednesday afternoon, and I hadn’t really spoken to anyone beyond the niceties until today. And it felt great.

The night is young

By the time I was finished writing today’s entry, the sun had sunk into the sea, not without turning the sky into a striking shade of pink. Everyone is taking pictures of the big fiery ball. I’m taking it all in. When I die, I hope this memory flashes before my eyes. Then I’ll remember where I had found peace, this time around.

The waters are now so still, one could walk upon the steely surface. Just like in a dream.

PS : I got two new weird insect bites, and counted five giant spiders (size of my whole hand) hanging outside my dorm’s window, one meter away (and they still look huge at that distance). And the freaking mosquitoes are biting THROUGH the clothing, so much for wearing long sleeves & pants. Looks like I will be drawing my last breath any day soon… Hashtag drama queen.

Day three just ended. But the night is young !

Sound of the evening: How to Save a Life, by The Fray